Programme de la semaine des cinémas de la Vallée de Montmorency :
Enghien (ugc) - Enghien (centre des arts), Franconville - Montmorency - Saint-Gratien - Taverny et les séances du mardi et mercredi de Ermont
Autres cinémas proches : Epinay-sur-Seine - Saint-Ouen l'Aumône
Zoom nouveauté : "Casa grande" de Fellipe Barbosa
L'histoire
Enfant de l’élite bourgeoise de Rio de Janeiro, Jean a 17 ans. Tandis que ses parents luttent pour cacher leur banqueroute, il prend peu à peu conscience des contradictions qui rongent sa ville et sa famille.
Un film de Fellipe Barbosa avec Thales Cavalcanti, Marcello Novaes, Suzana Pires, Clarissa Pinheiro, Bruna Amaya…
Bonus : propos de Fellipe Barbosa, réalisateur du film
Origine du film
En 2003, j’étais étudiant à l’Université Columbia de New York, quand mon père fut soudainement ruiné. Il nous le cacha aussi longtemps que possible. Le fait de ne pas avoir été là, avec ma famille, dans cette épreuve, m’a fait beaucoup réfléchir. "Casa Grande" est une manière de pallier cette absence en m’imaginant avec eux, à 17 ans, alors que j’allais passer mes examens et choisir ma future carrière. Ce film est une projection de ce qui se serait passé si j’avais été là à cette période.
J’ai été très inspiré par le système des quotas pour les étudiants des minorités, que Lula a mis en place en 2006, l’année où j’ai commencé le scénario. À cette époque, j’étais toujours à New York, je vivais à Harlem, où j’étais très exposé aux tensions raciales. Avant le système des quotas, le concept de race était rarement au cœur des débats – et peut être avions-nous raison, car il n’existe pas de race. Cependant, les tensions étaient bien là et n’étaient pas vraiment perçues consciemment, contrairement à New York. Ainsi, les quotas ont inauguré un nouveau débat sur les « races » au Brésil, et je voulais parler de ce contexte dans le film. L’idée était de l’intégrer ce débat à l’histoire de Jean. Il va donc doucement et subtilement prendre conscience de ces problèmes tout comme la majorité des brésiliens.
Les personnages
Il y a beaucoup de personnages, bien différents les uns des autres. C’est une réaction consciente à une tendance d’homogénéisation des personnages que j’observe dans le cinéma contemporain. Jean a été le personnage le plus difficile à écrire, peut-être parce qu’il est une sorte d’alter ego dans lequel je projette beaucoup de moi-même. Au premier abord, il n’était pas assez défini sur le papier et pouvait aller dans différentes directions. Je l’ai imaginé comme une toile noire et blanche qui serait ensuite colorée par l’acteur. Avec Thales Cavalcanti, choisi parmi les élèves du Lycée Saint Benoît, où j’ai également étudié, j’ai tout de suite retrouvé l’essence de Jean. Thales n’avait jamais joué auparavant, les autres jeunes non plus, mais étant dans la même école, ils étaient donc très à l’aise entre eux.
La perception de Jean est évidemment liée à ma propre expérience d’adolescent dans les années 90, notamment pour sa relation avec le personnel de maison. Ils étaient mes confidents, et je me sentais libre de leur parler de choses que j’étais incapable d’aborder avec mes parents. Pourtant malgré cette intimité, j’ai réalisé qu’en fait je ne savais rien d’eux et de la façon dont ils vivaient… Jusqu’à ce que j’aille chez eux, dans les favelas. Ma propre ignorance est devenue une inspiration.
Pour les personnages des parents, Hugo et Sonia, j’ai travaillé avec des acteurs de telenovelas très connus. J’aime beaucoup mélanger les registres et trouver une harmonie entre la technique et la spontanéité.
La maison est également un élément très important, presque un personnage à part entière. Lorsqu’on est dans la maison, le point de vue est celui du spectateur, mais on ne sort de la maison qu’avec Jean. Pour la construction de ce personnage, j’ai travaillé avec la répétition des cadres ouverts qui deviennent familiers pendant le film. De cette façon, on peut remarquer les changements qui s’opèrent dans le cadre, au fur et à mesure que la crise grandit.
Les personnages sont caractérisés par les différentes musiques qu’ils écoutent. Chacune se réfère à la musique que les acteurs écoutent dans la vie. Jean, Severino et Canulé ont d’ailleurs composé eux-mêmes les morceaux qu’ils jouent.
Rio de Janeiro
L’histoire est certes très universelle, comme toute histoire abordant le passage à l’âge adulte, mais il y a un grand nombre d’éléments et caractéristiques spécifiques à Rio de Janeiro.
Je crois que ce film n’aurait pu se passer ailleurs qu’à Rio, car c’est une ville très révélatrice des fractures sociales, où il y a une proximité unique entre les différentes classes, les différentes origines ethniques, qui entraîne une confusion que l’on ne peut voir qu’au Brésil.
Festivals
Après cette année passée à présenter le film en festivals, j’ai l’impression qu’il est parvenu à réunir aussi bien la critique que le public, ce dont je suis très heureux. "Casa Grande" a remporté autant de prix de la critique que de prix du public, mais le plus agréable a été la réaction très chaleureuse des spectateurs à l’issue des projections.
Avec mes films précédents, je m’étais habitué à un public davantage choqué, et pas toujours très enthousiaste. Mais "Casa Grande" a suscité un véritable intérêt de la part des spectateurs, que ce soit à Munich, San Sebastian, Havana ou Taipei. À Rotterdam, lors de la première, j’ai fondu en larmes quand on m’a dit « merci pour votre film » pour la vingtième fois.
Nouvelle génération du cinéma brésilien
Il y a aujourd’hui véritablement une nouvelle génération dans notre cinéma, une génération de réalisateurs qui a cette volonté de parler de soi dans les films, personnellement, entièrement. Cela donne lieu à des films authentiques, très différents les uns des autres. Aujourd’hui, plus de cent films sont produits chaque année au Brésil, aussi bien des comédies blockbusters que des films très expérimentaux, et également beaucoup de documentaires. Je crois d’ailleurs qu’en ce moment le Brésil produit des documentaires magnifiques.
Projets
Je devrais tourner cette année, à l’automne, "Gabriel et la montagne", une fiction basée sur le voyage de l’économiste brésilien Gabriel Buchmann, dans le centre et l’est de l’Afrique en 2009 jusqu’à sa mort sur le mont Mulanje au Malawi. Je vais aussi co-réaliser "Domingo" avec Clara Linhart. Le scénario, de Lucas Paeraizo, raconte l’histoire d’une famille décadente et conservatrice du sud du Brésil pendant le barbecue du réveillon le jour où Lula a pris sa présidence en 2003.
(extrait dossier de presse)
Programme de la semaine des cinémas de la Vallée de Montmorency :
Enghien (ugc) - Enghien (centre des arts), Franconville - Montmorency - Saint-Gratien - Taverny et les séances du mardi et mercredi de Ermont
Autres cinémas proches : Epinay-sur-Seine - Saint-Ouen l'Aumône
Zoom nouveauté : "Casa grande" de Fellipe Barbosa
L'histoire
Enfant de l’élite bourgeoise de Rio de Janeiro, Jean a 17 ans. Tandis que ses parents luttent pour cacher leur banqueroute, il prend peu à peu conscience des contradictions qui rongent sa ville et sa famille.
Un film de Fellipe Barbosa avec Thales Cavalcanti, Marcello Novaes, Suzana Pires, Clarissa Pinheiro, Bruna Amaya…
Bonus : propos de Fellipe Barbosa, réalisateur du film
Origine du film
En 2003, j’étais étudiant à l’Université Columbia de New York, quand mon père fut soudainement ruiné. Il nous le cacha aussi longtemps que possible. Le fait de ne pas avoir été là, avec ma famille, dans cette épreuve, m’a fait beaucoup réfléchir. "Casa Grande" est une manière de pallier cette absence en m’imaginant avec eux, à 17 ans, alors que j’allais passer mes examens et choisir ma future carrière. Ce film est une projection de ce qui se serait passé si j’avais été là à cette période.
J’ai été très inspiré par le système des quotas pour les étudiants des minorités, que Lula a mis en place en 2006, l’année où j’ai commencé le scénario. À cette époque, j’étais toujours à New York, je vivais à Harlem, où j’étais très exposé aux tensions raciales. Avant le système des quotas, le concept de race était rarement au cœur des débats – et peut être avions-nous raison, car il n’existe pas de race. Cependant, les tensions étaient bien là et n’étaient pas vraiment perçues consciemment, contrairement à New York. Ainsi, les quotas ont inauguré un nouveau débat sur les « races » au Brésil, et je voulais parler de ce contexte dans le film. L’idée était de l’intégrer ce débat à l’histoire de Jean. Il va donc doucement et subtilement prendre conscience de ces problèmes tout comme la majorité des brésiliens.
Les personnages
Il y a beaucoup de personnages, bien différents les uns des autres. C’est une réaction consciente à une tendance d’homogénéisation des personnages que j’observe dans le cinéma contemporain. Jean a été le personnage le plus difficile à écrire, peut-être parce qu’il est une sorte d’alter ego dans lequel je projette beaucoup de moi-même. Au premier abord, il n’était pas assez défini sur le papier et pouvait aller dans différentes directions. Je l’ai imaginé comme une toile noire et blanche qui serait ensuite colorée par l’acteur. Avec Thales Cavalcanti, choisi parmi les élèves du Lycée Saint Benoît, où j’ai également étudié, j’ai tout de suite retrouvé l’essence de Jean. Thales n’avait jamais joué auparavant, les autres jeunes non plus, mais étant dans la même école, ils étaient donc très à l’aise entre eux.
La perception de Jean est évidemment liée à ma propre expérience d’adolescent dans les années 90, notamment pour sa relation avec le personnel de maison. Ils étaient mes confidents, et je me sentais libre de leur parler de choses que j’étais incapable d’aborder avec mes parents. Pourtant malgré cette intimité, j’ai réalisé qu’en fait je ne savais rien d’eux et de la façon dont ils vivaient… Jusqu’à ce que j’aille chez eux, dans les favelas. Ma propre ignorance est devenue une inspiration.
Pour les personnages des parents, Hugo et Sonia, j’ai travaillé avec des acteurs de telenovelas très connus. J’aime beaucoup mélanger les registres et trouver une harmonie entre la technique et la spontanéité.
La maison est également un élément très important, presque un personnage à part entière. Lorsqu’on est dans la maison, le point de vue est celui du spectateur, mais on ne sort de la maison qu’avec Jean. Pour la construction de ce personnage, j’ai travaillé avec la répétition des cadres ouverts qui deviennent familiers pendant le film. De cette façon, on peut remarquer les changements qui s’opèrent dans le cadre, au fur et à mesure que la crise grandit.
Les personnages sont caractérisés par les différentes musiques qu’ils écoutent. Chacune se réfère à la musique que les acteurs écoutent dans la vie. Jean, Severino et Canulé ont d’ailleurs composé eux-mêmes les morceaux qu’ils jouent.
Rio de Janeiro
L’histoire est certes très universelle, comme toute histoire abordant le passage à l’âge adulte, mais il y a un grand nombre d’éléments et caractéristiques spécifiques à Rio de Janeiro.
Je crois que ce film n’aurait pu se passer ailleurs qu’à Rio, car c’est une ville très révélatrice des fractures sociales, où il y a une proximité unique entre les différentes classes, les différentes origines ethniques, qui entraîne une confusion que l’on ne peut voir qu’au Brésil.
Festivals
Après cette année passée à présenter le film en festivals, j’ai l’impression qu’il est parvenu à réunir aussi bien la critique que le public, ce dont je suis très heureux. "Casa Grande" a remporté autant de prix de la critique que de prix du public, mais le plus agréable a été la réaction très chaleureuse des spectateurs à l’issue des projections.
Avec mes films précédents, je m’étais habitué à un public davantage choqué, et pas toujours très enthousiaste. Mais "Casa Grande" a suscité un véritable intérêt de la part des spectateurs, que ce soit à Munich, San Sebastian, Havana ou Taipei. À Rotterdam, lors de la première, j’ai fondu en larmes quand on m’a dit « merci pour votre film » pour la vingtième fois.
Nouvelle génération du cinéma brésilien
Il y a aujourd’hui véritablement une nouvelle génération dans notre cinéma, une génération de réalisateurs qui a cette volonté de parler de soi dans les films, personnellement, entièrement. Cela donne lieu à des films authentiques, très différents les uns des autres. Aujourd’hui, plus de cent films sont produits chaque année au Brésil, aussi bien des comédies blockbusters que des films très expérimentaux, et également beaucoup de documentaires. Je crois d’ailleurs qu’en ce moment le Brésil produit des documentaires magnifiques.
Projets
Je devrais tourner cette année, à l’automne, "Gabriel et la montagne", une fiction basée sur le voyage de l’économiste brésilien Gabriel Buchmann, dans le centre et l’est de l’Afrique en 2009 jusqu’à sa mort sur le mont Mulanje au Malawi. Je vais aussi co-réaliser "Domingo" avec Clara Linhart. Le scénario, de Lucas Paeraizo, raconte l’histoire d’une famille décadente et conservatrice du sud du Brésil pendant le barbecue du réveillon le jour où Lula a pris sa présidence en 2003.
(extrait dossier de presse)
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