Suzon Pironet nous explique l'arrêt de son association de Franconville "Les Enfants du Nil" : une rencontre émouvante !

L'association "Les enfants du Nil" a été créée à Franconville en 1999 par Suzon Pironet pour venir en aide aux enfants de Haute-Egypte. Aujourd'hui, sa fondatrice a décidé d'arrêter ses actions caritatives. Partons une nouvelle fois à la rencontre de cette femme exemplaire au grand cœur que les jeunes enfants égyptiens remercient vivement : « Merci Madame Suzon ! »

Suzon, vous avez annoncé la fin de l'aventure des "Enfants du Nil" à la fin de l'année 2017. Savez-vous combien de livraisons de matériel avez-vous effectué en Egypte depuis 1999 ?
Oh ! Je n'ai pas compté ! Environ une centaine, je pense. Au début nous faisions 6 livraisons par an, puis après 5 et 4 ces dernières années.
Cela représente plus de 350 kg par voyage : du matériel médical, des fournitures scolaires, des jouets, des vêtements, des cannes anglaises et un fauteuil roulant que nous offrons à une personne handicapée démunie.

En regardant un petit peu dans le rétroviseur, quelle est votre plus grande fierté ?
(Elle réfléchit…) Je suis fière d'avoir redonné des jambes à Mohamed, un enfant paralysé, puis d'avoir travaillé pour la léproserie à Abouzabel (à côté du Caire), et aussi d'avoir réalisé des projets pérennes comme deux écoles qui vont recevoir 300 enfants… Et tout cela a été possible grâce à tous les adhérents des "Enfants du Nil". Je n'aurais rien pu faire toute seule.

Pouvez-vous nous raconter votre rencontre avec Mohamed ?
L'association lui a offert un fauteuil roulant destiné à un adulte. Je pensais que cela n'allait pas convenir pour un enfant de 5 ans mais tout le village me disait : « Il faut le donner à Mohamed. »… Alors, je le reverrai toute ma vie réussir à tourner les roues du fauteuil et tout le village crier « Vas-y Mohamed ! ». Il m'a regardé et deux grosses larmes de reconnaissance lui sont tombées. J'ai voulu connaître son histoire et l'on m'a dit qu'il était peut-être opérable mais que c'était compliqué. J'ai consulté des spécialistes à l'hôpital d'Eaubonne pour des conseils, puis à Louxor un orthopédiste a pris le risque de l'opération qui a réussi. Aujourd'hui il marche en boitant mais il a pu aller à l'école et quitter son état sauvage. Jusqu'à notre venue, il restait cloitré sur son lit. C'est impossible de zapper ces souvenirs…
Les remises de fauteuils roulant étaient toujours des moments particuliers. C'était une surprise pour les personnes qui n'étaient pas prévenues…
Je vais vous confier un autre beau souvenir : une petite fille paralysée n'avait pas de fauteuil roulant. Son frère qui savait lire et écrire souhaitait que sa sœur puisse aller à l'école pour apprendre à son tour. Par conséquent, c'est lui qui la portait chaque matin pour l'emmener à l'école.
Avec le fauteuil roulant que nous avons apporté, la petite fille a gagné en autonomie et le frère a pu retourner à l'école. Une belle histoire !

Vous avez évoqué les deux écoles financées par l'association…
Oui ce sont des actions pérennes dont nous sommes fiers. Les "Enfants du Nil" ont financé la construction de deux écoles, mais aussi refait les classes et sanitaires à Sawaghi, une salle pour l'alphabétisation, un atelier de couture pour les femmes et à Bourdadi, outre une école, la maison de la femme et l'enfant.
Je pense que cela représente un beau bilan pour l'association. Nous avons rencontré de nombreux obstacles pour ces projets mais nous n'avons jamais baissé les bras. Je suis une obstinée !

L'association a aussi parrainé des enfants de Haute-Egypte ?
Oui, cela a bien fonctionné. 40 enfants ont été parrainés par des adhérents qui s'engageaient sur 6 ans. Un vrai geste solidaire qui a permis à des enfants de suivre une scolarité "normale" et d'échapper un petit peu à la misère quotidienne.

Jusqu'à combien d'adhérents a compté l'association ?
Le nombre d'adhérents à l'association a oscillé entre 60 et 120. Deux événements ont provoqué récemment une baisse des adhérents : la chute du président Moubarak et les attentats en France à partir de 2015.
Certaines personnes ont eu un réflexe islamophobe qui m'a déçu, un adhérent m'a même dit : « ce sont ces enfants que tu sauves qui vont ensuite frapper Israël ou ailleurs »: Ça fait mal à entendre !

Avez-vous un regret particulier ?
(Sans hésiter) Oui ! J'aurais aimé construire un hôpital pour les femmes ou bien un centre de dialyse. Mais c'était vraiment très compliqué…

Impossible d'évoquer les "Enfants du Nil" sans parler des Sœurs Comboniennes, ces femmes que vous admirez ?
C'est vrai que les rencontres avec ces femmes ont marqué ma vie d'autant plus que je suis athée. Leur foi est exceptionnelle et leur engagement est exemplaire. Elles m'ont donné leur confiance et c'est le plus beau des cadeaux. J'ai reçu de leur part de nombreuses confidences, elles m'ont dit pourquoi elles étaient devenues religieuses, elles sont franches, et directes. L'un d'elles m'a même dit : « J'arrive au seuil de ma vie et vous êtes la plus belle rencontre de ma vie ». Cela m'a touchée énormément.
Je vais vous livrer un petit scoop pour terminer : j'ai eu aussi la chance d'avoir une correspondance pendant quelques années avec Sœur Emmanuelle qui est une référence pour moi. Elle a même évoqué "les enfants du Nil" dans l'un de ses ouvrages.

Evoquons maintenant votre décision de terminer l'aventure des "Enfants du Nil" en fin d'année. Comment avez-vous pris la décision ?
C'est mon chirurgien cardiaque qui a pris la décision pour moi ! Je plaisante mais c'est vrai qu'il m'a invitée à lever le pied si je voulais vivre… Je dois subir une nouvelle opération l'année prochaine. C'est donc douloureux de mettre fin à cette aventure mais il fallait que je le fasse.

Personne ne pouvait reprendre le flambeau ? L'association reposait sur vos épaules ?
A vrai dire, je n'avais jamais pensé que l'association allait prendre cette envergure. Et c'est vrai que j'ai eu du mal à déléguer. C'était donc difficile à quelqu'un de reprendre le flambeau d'autant plus que pour les livraisons, il fallait avoir de la disponibilité et des notions de langue arabe.
Pour ma part, cet arrêt est douloureux car "Les Enfants du Nil" m'accompagnaient depuis plus de 19 ans mais je dois penser à ma santé avant tout. Je vais donc me reposer et retrouver une vie sociale normale...

Comment ont réagi les adhérents de l'association ?
Ils ont vraiment compris ma décision et je les remercie chaleureusement.
Lors du dernier repas de l'association, ils m'ont témoigné de leur reconnaissance et cela m'a beaucoup touchée. J'ai pleuré quand une jeune fille m'a dit : « Tu es un exemple pour moi, j'ai orienté ma vie différemment au regard de ce que je t'ai vu faire : ton obstination et ton entêtement à aider les gens coûte que coûte, à tenir tes promesses quelques soient tes problèmes… ». Je n'en reviens pas !

Le traditionnel spectacle de danse orientale prévu ce samedi 25 novembre au profit des "Enfants du Nil" sera donc le dernier grand événement de l'association ?
Le spectacle est toujours de très grande qualité et les fonds récoltés serviront pour terminer le financement de l'aménagement notre deuxième école ! Oui, je vous attends nombreux !

Bravo et respect pour tout ce que vous avez fait : vous êtes vraiment un exemple ! Merci pour votre disponibilité.

Grande soirée de danse orientale
Samedi 25 novembre 2017 à 20h30 - Centre Exupéry 32 rue de la Station Franconville - Tarif : 10 € (au profit de l'association "Les enfants du Nil") - Billets en vente chez Josie Toilettage au centre commercial de l'Epine Guyon (01 30 72 41 97), auprès de l'association (01 34 13 33 33 ou 06 86 18 65 44), auprès du professeur (06 87 19 42 79).

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