Le destin exceptionnel de Pierre Ollivier-Descloseaux : le gardien des dépouilles du roi Louis XVI et de Marie-Antoinette est devenu maire d'Eaubonne !

Rendez-vous compte : Pierre-Louis Ollivier-Descloseaux a été désigné maire d'Eaubonne par… arrêté préfectoral le 26 mars 1816. Il prendra ses fonctions le 26 avril mais mourra trois mois plus tard de la maladie de la goutte à l'âge honorable de 84 ans. Mais comment en vient-on à être nommé maire sur ordre du roi ? Coup de projecteur sur son destin exceptionnel qui le mènera jusqu'à cette fonction qu'il a exercée peu de temps.

Né à Versailles en 1732, il se retrouve à 22 ans, chef de cuisine de Monsieur le marquis de Marivaux (aucun rapport avec le célèbre auteur de pièces de théâtre) avant de changer de cap et devenir à 46 ans… avocat au Parlement de Paris ! Une trajectoire personnelle très originale marquée également par un mariage en 1755 dont naîtront trois filles.
Mais son destin va s'accélérer avec l'irruption de la Révolution !
Il emménage d'abord au 48 rue d'Anjou, tout près de la Madeleine. Puis il s'engage dans de nombreuses initiatives qui voient le jour dans son quartier. Il est notamment élu président du district de Saint-Philippe-du-Roule et contribue à l'écriture du cahier du Tiers état. Il devient aussi membre des Amis de la Constitution.
Mais subitement en 1791, il démissionne de la présidence, prétextant des obligations personnelles. Mais les historiens s'accordent à penser qu'il a souhaité se retirer de la vie publique devenue dangereuse car, au fond de lui, il restait un royaliste convaincu !

Ensuite la grande Histoire va s'inviter chez Descloseaux ! En effet, sa maison est voisine du cimetière de la Madeleine où seront inhumés… Louis XVI et Marie-Antoinette ! Il éditera même dans un petit opuscule la listes des 1343 personnes jugées par le Tribunal Révolutionnaire et inhumées dans ce cimetière rue d'Anjou. Celui-ci sera finalement fermé devant la plainte des riverains qui se plaignaient des odeurs épouvantables liées aux trop nombreux cadavres enfouis dans une terre remuée sans cesse.
Le cimetière sera alors revendu d'abord à un ébéniste, puis à des créanciers qui le revendront en 1802 à Pierre Ollivier-Descloseaux pour 4 550 francs ! Il devient ainsi le pieux gardien des dépouilles du roi Louis XVI et de Marie Antoinette : il recouvrira leur tombe d'une bande de gazon et l'entourera de cyprès. Il veillera ainsi sur cette sépulture royale jusqu'à l'accession au pouvoir en 1814 de Louis XVIII, le frère de Louis XVI.
Le nouveau souverain rachète alors le cimetière à Descloseaux pour 50 000 francs et organisent un transfert fastueux des dépouilles de son frère et sa belle-sœur Marie-Antoinette jusqu'à la basilique royale de Saint-Denis.
Louis XVIII fera aussi ériger une chapelle expiatoire en leur mémoire sur le terrain de l'ancien cimetière, rue d'Anjou.

En récompense de son dévouement, Descloseaux est alors décoré du grand cordon de l'ordre de Saint-Michel et reçoit une jolie dotation annuelle de 8 000 francs. Enfin, il est nommé… maire d'Eaubonne sur ordre du roi en mars 1816 ! Un honneur dont il profita peu comme nous l'avons vu en début d'article…

Pourquoi maire d'Eaubonne me direz-vous ? Tout simplement parce que Descloseaux avait acquis dès 1802, le "bâtiment neuf" construit par le célèbre architecte Claude Nicolas Ledoux, qui n'est autre que l'hôtel de Mézières actuel ! Pendant treize ans, le vieil homme s'est partagé entre sa résidence parisienne rue d'Anjou et sa villégiature eaubonnaise.

Pour information, Pierre-Ollivier Descloseaux repose au cimetière du Père Lachaise où l'on peut lire sur son piédestal cette inscription :
« Pierre Louis Ollivier Descloseaux,
chevalier de l'ordre de Saint-Michel
propriétaire du cimetière de la Madeleine
Où ont été inhumés les restes de sa majesté
Louis XVI et de la reine Marie-Antoinette
Né à Versailles le 30 mai 1732
Décédé à Paris le 4 juillet 1816.

De la cendre des rois, pieux dépositaire,
Le ciel daigna bénir ses soins religieux.
Il a revu Louis au trône héréditaire
Et, comme Siméon, il a fermé les yeux. »

Un grand merci à Hervé Collet et ses recherches historiques qui permettent l'écriture de cet article. Vous pouvez retrouver le destin de Pierre Ollivier-Descloseaux et d'autres personnalités eaubonnaises dans son excellent livre "Eaubonne de la Révolution au 1900", disponible dans la Petite boutique du journal.