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Soirée "spécial Yann le Quellec" en présence du réalisateur à l'occasion de la sortie de son film "Cornelius le meunier hurlant".

Publié le : 04-05-2018

L'équipe du cinéma "les Toiles" de Saint-Gratien nous propose une soirée exceptionnelle en compagnie du réalisateur Yann Le Quellec. Au programme : les deux moyens métrages du metteur en scène en apéritif et ensuite la projection de "Cornelius le meunier hurlant", son premier long métrage sorti ce mercredi 2 mai.
Un menu que les cinéphiles ne vont pas bouder !

 

Je sens le beat qui monte en moi de Yann Le Quellec18h30
"Je sens le beat qui monte en moi" (Prix Jean Vigo 2013)
Rosalba, jeune guide touristique, souffre d’une affection étrange : la moindre mélodie provoque chez elle une gesticulation et elle se met à danser, de façon aussi subite qu’incontrôlable. Malgré ses ruses pour cacher son excentricité, ce corps indomptable pourrait bien séduire son surprenant collègue Alain.
Suivi de

Le quepa sur la vilni de Yann Le Quellec

"Le quepa sur la vilni"
Aujourd’hui, André sort de sa paisible retraite : sur ordre du maire, il doit mener à travers monts une troupe d’hommes-sandwichs à vélos pour attirer les spectateurs à l’inauguration du cinéma local. Malgré sa détermination, l’ancien facteur a bien du mal à dompter ses jeunes et impétueux coéquipiers.

 

21h
"Cornelius le meunier hurlant" (Prix du Public Belfort 2017)
Projection suivie d’une rencontre avec le réalisateur Yann Le Quellec.

Cornelius le meunier hurlantL’histoire
Un beau jour, un village du bout du monde voit s'installer un mystérieux visiteur, Cornelius Bloom, qui aussitôt se lance dans la construction d'un moulin. D’abord bien accueilli, le nouveau meunier a malheureusement un défaut : toutes les nuits, il hurle à la lune, empêchant les villageois de dormir. Ces derniers n’ont alors plus qu’une idée en tête : le chasser.  Mais Cornelius, soutenu par la belle Carmen, est prêt à tout pour défendre sa liberté et leur amour naissant.
Un film de Yann Le Quellec avec Bonaventure Gacon, Anaïs Demoustier, Gustave Kervern, Christophe Paou, Denis Lavant, Solange Milhaud, Camille Boitel…

Samedi 5 mai 2018 à partir de 18h30 – Cinéma "Les Toiles" place François Truffaut Saint-Gratien - Tarif pour les 3 films : 6 €
Le bar sera ouvert pour accueillir les spectateurs entre les deux séances. Les préventes seront ouvertes à partir de mercredi 2 mai à la caisse du cinéma.

>> Bande annonce du film

 

Bonus : propos de Yann Le Quellec, réalisateur du film

Pourquoi, pour votre premier long-métrage, avez-vous choisi d’adapter "Le meunier hurlant", de l’écrivain finlandais Arto Paasilinna ?
J’ai lu "Le meunier hurlant" il y a une dizaine d’années et depuis, l’envie d’adapter ce roman à l’écran ne m’a pas quitté. On y plonge dans un univers foisonnant, picaresque, d’une immense liberté. Et très drôle. Un humour doux amer et burlesque souvent grinçant, sur un fil, mais d’une grande humanité et dénué de cynisme.
Il y a dans l’univers du récit de Paasilinna une forme de naïveté qui irrigue votre récit, vos personnages. Avez-vous eu l’intention de vous approcher du conte ?
Les héros chez Paasilinna ne se résignent jamais. Ils avancent, envers et contre tout. Ils prennent leurs rêves pour des réalités et se heurtent en permanence à un monde désenchanté. On peut trouver cela naïf, moi je crois que c’est un acte de foi courageux et plein d’élégance.
Le meunier se heurte en permanence à la norme. Lorsque le maire Cardamome (Gustave Kervern) explique à Cornélius qu’à cause de ses hurlements, il continuera à être chassé de village en village, il dit vrai. Mais Cornélius n’en a cure : il veut continuer à travailler, avoir du grain à moudre et défendre sa place dans la communauté malgré tout. Il ne renonce pas.
Au-delà de sa passion pour les moulins, c’est cette foi qui rapproche à mes yeux Cornélius de Don Quichotte et en fait un héros tragique. S’il est naïf, c’est qu’il n’a pas le choix. S’il cesse d’espérer, il sombre. Lutter contre le désespoir (ou dans le cas de Cornélius le hurler) me semble une bonne raison de continuer à faire de la farine ou des films.
Et puis, sous ses dehors de conte hors-sol, le récit est imprégné d’une mélancolie sourde et d’un regard sans concession sur la réalité contemporaine. Le conte ne fuit pas le réel. Il permet de l’aborder sous un angle fantastique, merveilleux, pop.
Cornélius est un étranger qui cherche à s’implanter dans une communauté mais est tiraillé entre l’expression de sa singularité individuelle et la prise en compte de la norme sociale ; et le village lui-même est partagé entre la nécessité de s’ouvrir pour éviter l’asphyxie et la tentation du rejet, née de la peur de la dilution et de la perte d’identité. C’est le cas de presque tous les héros de western, chez John Ford notamment.
Mais c’est aussi une situation très concrète pour beaucoup de monde aujourd’hui, pas seulement pour les migrants et pas uniquement en France.
Cornelius le meunier hurlant de Yann Le QuellecEn fin de compte, s’il y a une naïveté, c’est plutôt celle du parti pris de la littéralité, de la frontalité avec laquelle le film avance. Si le héros est triste, il hurle. Si les gens sont contents, ils dansent toute la nuit.
Mais pour revenir à votre question sur le désir d’adaptation du livre, il y a avant tout l’envie de suivre ce héros, Cornélius. C’est un héros bigger than life, dans le sillage des personnages de "Zorba le Grec", "Jeremiah Johnson", "Vol au-dessus d’un nid de coucou" ou "La Conjuration des imbéciles".
J’avais envie de relever le défi d’un certain romanesque, avec mes moyens, qui ne sont évidemment pas ceux du cinéma hollywoodien.

Les décors naturels du film sont spectaculaires et participent beaucoup au souffle romanesque du film. Mais tourner dans des endroits aussi reculés induit beaucoup de contraintes, pourquoi y teniez-vous tant ?
Je cherche à créer l’univers en propre du film, un univers utopique au double sens de lieu qui n’existe pas et de lieu fantasmé. Mais à partir de territoires réels, qui préexistent au film. Juste par le jeu du regard et de la mise en scène. De fait, j’aime quand un auteur arpente un territoire et y projette son univers, comme Alain Guiraudie quand il filme le Tarn dans "Du soleil pour les gueux".
J’ai dans un premier temps effectué un long travail de repérages solitaires à vélo. Pour finalement tourner dans trois territoires : nous avons construit le moulin au bord d’un précipice près du prodigieux cirque de Navacelles, dans le Larzac, au fond duquel se trouve le village que l’on voit dans le film. Autour se trouvent des causses, notamment le causse de Blandas, qui sont de véritables décors de western, arides, secs, rugueux, balayés par les vents.
Pour l’asile, nous nous sommes installés à la forteresse de Salses, construit au XVème siècle pour garder la frontière entre la France et la Catalogne.
Enfin, pour l’errance de Cornélius, nous avons tourné dans les Alpes, au-dessus de l’Alpe d’Huez, entre 2200 et 3600 mètres d’altitude dans des endroits difficiles d’accès et soumis à des conditions météorologiques extrêmes.
J’ai choisi ces endroits moins pour leur pittoresque que pour leur puissance. Je souhaitais que le parcours de Cornélius trouve un souffle épique, homérique. Confronter Cornélius à des lieux « chargés » et rudes y a beaucoup contribué. Le cirque de Navacelles évoque le Colorado des westerns ; les costumes des villageois sont librement inspirés par des communautés amish. J’avais envie de déterritorialiser le western ou plutôt de « westerniser » des territoires que je connais bien. Le film joue alors avec l’inconscient cinéphilique du spectateur, un peu comme quand Luc Moullet tourne "Une aventure de Billy le Kid" ans les Roubines.

Le film dégage aussi une certaine sensualité...
Pour moi, la présence de la nature est avant tout promesse de sensations. Le souffle du vent qui balaie le moulin et les personnages, le courant des torrents, ou les fleurs si chères à Carmen sont autant d’éléments qui érotisent la relation entre Carmen et Cornélius et contribuent à la sensualité du film. De fait, en explorant ces territoires, j’ai tenté de filmer la relation des corps à une nature omniprésente. Car la trajectoire de Cornélius passe par un retour à la nature - chassé du monde des hommes, il trouve refuge dans les montagnes - et même à l’état de nature. Là, il entretient un rapport quasi animal à son environnement.

Cornelius le meunier hurlant de Yann Le QuellecBonaventure Gacon, qui interprète Cornélius, est une vraie découverte. Il vient d’un autre univers, qui est le cirque, comment s’est passée cette rencontre ?
J’ai écrit le scénario en étant très angoissé par la question de l’acteur : qui va pouvoir interpréter Cornélius ?
J’avais en tête un Depardieu jeune. Il me fallait trouver un acteur charismatique qui ait une présence physique qui puisse impressionner. Une personnalité hors-norme mais sensible qui puisse aller vers la danse, vers le burlesque ou qui ait des « superpouvoirs » sur lesquels je puisse m’appuyer d’un point de vue chorégraphique. J’ai fait de nombreux castings d’acteurs de cinéma, de théâtre, mais aussi de danseurs, du casting sauvage... et pendant longtemps je n’ai pas trouvé.
J’étais assez désespéré. Et là, deux amis ont lu le scénario, et m’ont dit, sans se concerter, « ton Cornélius existe ! Dans la vie, il s’appelle
Bonaventure Gacon. C’est une pointure du monde du cirque et du spectacle vivant, il est extraordinaire. Ça c’est la bonne nouvelle. La mauvaise c’est qu’il n’y a aucune chance qu’il accepte de faire du cinéma : il est trop sauvage... ». Bonaventure Gacon, m’ont-ils dit, était connu à la fois comme artiste de cirque - c’est un « porteur » très puissant au sein du cirque Trottola - et aussi comme auteur d’un spectacle où il est seul en scène, intitulé "Par le Boudu". C’est un spectacle culte pour beaucoup de monde (Pierre Etaix par exemple l’admirait) comme je m’en suis aperçu par la suite.
Je suis donc allé en Suisse voir son spectacle et j’ai été impressionné à la fois par sa puissance, son agilité incroyable, et enfin par sa nature, une personne belle presque au sens archaïque du terme, avec un rapport absolument pur aux gens et aux choses. Je sentais que cette humanité, et une réelle fragilité alors que c’est un colosse, pouvaient irriguer le personnage de Cornélius. Je lui ai immédiatement proposé le rôle, sans hésitation ! Il a effectivement commencé par décliner la proposition. Puis il a vu mes films précédents, nous avons beaucoup parlé ensemble et il a finalement accepté. Il s’est totalement investi dans la préparation et le tournage du film.

Cornelius le meunier hurlant de Yann Le QuellecEt Anaïs Demoustier ?
Je cherchais une personnalité qui puisse être à la fois solaire, comme certaines actrices des années 1950, charmante, qui ait une poésie et dont on puisse sentir qu’il y ait chez elle une sorte de fascination face à ce que propose Cornélius.
Il y a eu une évidence quand Anaïs et Bonaventure se sont rencontrés. D’abord, la confrontation de leurs corps était saisissante : d’emblée on était du côté de "La Belle et la Bête", dans le conte. Surtout, Bonaventure était extrêmement ému par ce que proposait Anaïs, qui était également déstabilisée, mais en jouait, rebondissait merveilleusement. Une sorte d’admiration mutuelle, teintée de respect et de charme. Et dans le film, la fraîcheur proposée par Anaïs fait contrepoint à la violence du hurlement. Carmen est un personnage un peu décalé, mais qui est traversé par une sensibilité, une légèreté, et une forme de pudeur et d’empathie par rapport à la singularité de Cornélius. Et Anaïs a une intelligence et une technique de jeu sidérantes : elle peut tout faire !
(extrait dossier de presse)

L'équipe du cinéma "les Toiles" de Saint-Gratien nous propose une soirée exceptionnelle en compagnie du réalisateur Yann Le Quellec. Au programme : les deux moyens métrages du metteur en scène en apéritif et ensuite la projection de "Cornelius le meunier hurlant", son premier long métrage sorti ce mercredi 2 mai.
Un menu que les cinéphiles ne vont pas bouder !

 

Je sens le beat qui monte en moi de Yann Le Quellec18h30
"Je sens le beat qui monte en moi" (Prix Jean Vigo 2013)
Rosalba, jeune guide touristique, souffre d’une affection étrange : la moindre mélodie provoque chez elle une gesticulation et elle se met à danser, de façon aussi subite qu’incontrôlable. Malgré ses ruses pour cacher son excentricité, ce corps indomptable pourrait bien séduire son surprenant collègue Alain.
Suivi de

Le quepa sur la vilni de Yann Le Quellec

"Le quepa sur la vilni"
Aujourd’hui, André sort de sa paisible retraite : sur ordre du maire, il doit mener à travers monts une troupe d’hommes-sandwichs à vélos pour attirer les spectateurs à l’inauguration du cinéma local. Malgré sa détermination, l’ancien facteur a bien du mal à dompter ses jeunes et impétueux coéquipiers.

 

21h
"Cornelius le meunier hurlant" (Prix du Public Belfort 2017)
Projection suivie d’une rencontre avec le réalisateur Yann Le Quellec.

Cornelius le meunier hurlantL’histoire
Un beau jour, un village du bout du monde voit s'installer un mystérieux visiteur, Cornelius Bloom, qui aussitôt se lance dans la construction d'un moulin. D’abord bien accueilli, le nouveau meunier a malheureusement un défaut : toutes les nuits, il hurle à la lune, empêchant les villageois de dormir. Ces derniers n’ont alors plus qu’une idée en tête : le chasser.  Mais Cornelius, soutenu par la belle Carmen, est prêt à tout pour défendre sa liberté et leur amour naissant.
Un film de Yann Le Quellec avec Bonaventure Gacon, Anaïs Demoustier, Gustave Kervern, Christophe Paou, Denis Lavant, Solange Milhaud, Camille Boitel…

Samedi 5 mai 2018 à partir de 18h30 – Cinéma "Les Toiles" place François Truffaut Saint-Gratien - Tarif pour les 3 films : 6 €
Le bar sera ouvert pour accueillir les spectateurs entre les deux séances. Les préventes seront ouvertes à partir de mercredi 2 mai à la caisse du cinéma.

>> Bande annonce du film

 

Bonus : propos de Yann Le Quellec, réalisateur du film

Pourquoi, pour votre premier long-métrage, avez-vous choisi d’adapter "Le meunier hurlant", de l’écrivain finlandais Arto Paasilinna ?
J’ai lu "Le meunier hurlant" il y a une dizaine d’années et depuis, l’envie d’adapter ce roman à l’écran ne m’a pas quitté. On y plonge dans un univers foisonnant, picaresque, d’une immense liberté. Et très drôle. Un humour doux amer et burlesque souvent grinçant, sur un fil, mais d’une grande humanité et dénué de cynisme.
Il y a dans l’univers du récit de Paasilinna une forme de naïveté qui irrigue votre récit, vos personnages. Avez-vous eu l’intention de vous approcher du conte ?
Les héros chez Paasilinna ne se résignent jamais. Ils avancent, envers et contre tout. Ils prennent leurs rêves pour des réalités et se heurtent en permanence à un monde désenchanté. On peut trouver cela naïf, moi je crois que c’est un acte de foi courageux et plein d’élégance.
Le meunier se heurte en permanence à la norme. Lorsque le maire Cardamome (Gustave Kervern) explique à Cornélius qu’à cause de ses hurlements, il continuera à être chassé de village en village, il dit vrai. Mais Cornélius n’en a cure : il veut continuer à travailler, avoir du grain à moudre et défendre sa place dans la communauté malgré tout. Il ne renonce pas.
Au-delà de sa passion pour les moulins, c’est cette foi qui rapproche à mes yeux Cornélius de Don Quichotte et en fait un héros tragique. S’il est naïf, c’est qu’il n’a pas le choix. S’il cesse d’espérer, il sombre. Lutter contre le désespoir (ou dans le cas de Cornélius le hurler) me semble une bonne raison de continuer à faire de la farine ou des films.
Et puis, sous ses dehors de conte hors-sol, le récit est imprégné d’une mélancolie sourde et d’un regard sans concession sur la réalité contemporaine. Le conte ne fuit pas le réel. Il permet de l’aborder sous un angle fantastique, merveilleux, pop.
Cornélius est un étranger qui cherche à s’implanter dans une communauté mais est tiraillé entre l’expression de sa singularité individuelle et la prise en compte de la norme sociale ; et le village lui-même est partagé entre la nécessité de s’ouvrir pour éviter l’asphyxie et la tentation du rejet, née de la peur de la dilution et de la perte d’identité. C’est le cas de presque tous les héros de western, chez John Ford notamment.
Mais c’est aussi une situation très concrète pour beaucoup de monde aujourd’hui, pas seulement pour les migrants et pas uniquement en France.
Cornelius le meunier hurlant de Yann Le QuellecEn fin de compte, s’il y a une naïveté, c’est plutôt celle du parti pris de la littéralité, de la frontalité avec laquelle le film avance. Si le héros est triste, il hurle. Si les gens sont contents, ils dansent toute la nuit.
Mais pour revenir à votre question sur le désir d’adaptation du livre, il y a avant tout l’envie de suivre ce héros, Cornélius. C’est un héros bigger than life, dans le sillage des personnages de "Zorba le Grec", "Jeremiah Johnson", "Vol au-dessus d’un nid de coucou" ou "La Conjuration des imbéciles".
J’avais envie de relever le défi d’un certain romanesque, avec mes moyens, qui ne sont évidemment pas ceux du cinéma hollywoodien.

Les décors naturels du film sont spectaculaires et participent beaucoup au souffle romanesque du film. Mais tourner dans des endroits aussi reculés induit beaucoup de contraintes, pourquoi y teniez-vous tant ?
Je cherche à créer l’univers en propre du film, un univers utopique au double sens de lieu qui n’existe pas et de lieu fantasmé. Mais à partir de territoires réels, qui préexistent au film. Juste par le jeu du regard et de la mise en scène. De fait, j’aime quand un auteur arpente un territoire et y projette son univers, comme Alain Guiraudie quand il filme le Tarn dans "Du soleil pour les gueux".
J’ai dans un premier temps effectué un long travail de repérages solitaires à vélo. Pour finalement tourner dans trois territoires : nous avons construit le moulin au bord d’un précipice près du prodigieux cirque de Navacelles, dans le Larzac, au fond duquel se trouve le village que l’on voit dans le film. Autour se trouvent des causses, notamment le causse de Blandas, qui sont de véritables décors de western, arides, secs, rugueux, balayés par les vents.
Pour l’asile, nous nous sommes installés à la forteresse de Salses, construit au XVème siècle pour garder la frontière entre la France et la Catalogne.
Enfin, pour l’errance de Cornélius, nous avons tourné dans les Alpes, au-dessus de l’Alpe d’Huez, entre 2200 et 3600 mètres d’altitude dans des endroits difficiles d’accès et soumis à des conditions météorologiques extrêmes.
J’ai choisi ces endroits moins pour leur pittoresque que pour leur puissance. Je souhaitais que le parcours de Cornélius trouve un souffle épique, homérique. Confronter Cornélius à des lieux « chargés » et rudes y a beaucoup contribué. Le cirque de Navacelles évoque le Colorado des westerns ; les costumes des villageois sont librement inspirés par des communautés amish. J’avais envie de déterritorialiser le western ou plutôt de « westerniser » des territoires que je connais bien. Le film joue alors avec l’inconscient cinéphilique du spectateur, un peu comme quand Luc Moullet tourne "Une aventure de Billy le Kid" ans les Roubines.

Le film dégage aussi une certaine sensualité...
Pour moi, la présence de la nature est avant tout promesse de sensations. Le souffle du vent qui balaie le moulin et les personnages, le courant des torrents, ou les fleurs si chères à Carmen sont autant d’éléments qui érotisent la relation entre Carmen et Cornélius et contribuent à la sensualité du film. De fait, en explorant ces territoires, j’ai tenté de filmer la relation des corps à une nature omniprésente. Car la trajectoire de Cornélius passe par un retour à la nature - chassé du monde des hommes, il trouve refuge dans les montagnes - et même à l’état de nature. Là, il entretient un rapport quasi animal à son environnement.

Cornelius le meunier hurlant de Yann Le QuellecBonaventure Gacon, qui interprète Cornélius, est une vraie découverte. Il vient d’un autre univers, qui est le cirque, comment s’est passée cette rencontre ?
J’ai écrit le scénario en étant très angoissé par la question de l’acteur : qui va pouvoir interpréter Cornélius ?
J’avais en tête un Depardieu jeune. Il me fallait trouver un acteur charismatique qui ait une présence physique qui puisse impressionner. Une personnalité hors-norme mais sensible qui puisse aller vers la danse, vers le burlesque ou qui ait des « superpouvoirs » sur lesquels je puisse m’appuyer d’un point de vue chorégraphique. J’ai fait de nombreux castings d’acteurs de cinéma, de théâtre, mais aussi de danseurs, du casting sauvage... et pendant longtemps je n’ai pas trouvé.
J’étais assez désespéré. Et là, deux amis ont lu le scénario, et m’ont dit, sans se concerter, « ton Cornélius existe ! Dans la vie, il s’appelle
Bonaventure Gacon. C’est une pointure du monde du cirque et du spectacle vivant, il est extraordinaire. Ça c’est la bonne nouvelle. La mauvaise c’est qu’il n’y a aucune chance qu’il accepte de faire du cinéma : il est trop sauvage... ». Bonaventure Gacon, m’ont-ils dit, était connu à la fois comme artiste de cirque - c’est un « porteur » très puissant au sein du cirque Trottola - et aussi comme auteur d’un spectacle où il est seul en scène, intitulé "Par le Boudu". C’est un spectacle culte pour beaucoup de monde (Pierre Etaix par exemple l’admirait) comme je m’en suis aperçu par la suite.
Je suis donc allé en Suisse voir son spectacle et j’ai été impressionné à la fois par sa puissance, son agilité incroyable, et enfin par sa nature, une personne belle presque au sens archaïque du terme, avec un rapport absolument pur aux gens et aux choses. Je sentais que cette humanité, et une réelle fragilité alors que c’est un colosse, pouvaient irriguer le personnage de Cornélius. Je lui ai immédiatement proposé le rôle, sans hésitation ! Il a effectivement commencé par décliner la proposition. Puis il a vu mes films précédents, nous avons beaucoup parlé ensemble et il a finalement accepté. Il s’est totalement investi dans la préparation et le tournage du film.

Cornelius le meunier hurlant de Yann Le QuellecEt Anaïs Demoustier ?
Je cherchais une personnalité qui puisse être à la fois solaire, comme certaines actrices des années 1950, charmante, qui ait une poésie et dont on puisse sentir qu’il y ait chez elle une sorte de fascination face à ce que propose Cornélius.
Il y a eu une évidence quand Anaïs et Bonaventure se sont rencontrés. D’abord, la confrontation de leurs corps était saisissante : d’emblée on était du côté de "La Belle et la Bête", dans le conte. Surtout, Bonaventure était extrêmement ému par ce que proposait Anaïs, qui était également déstabilisée, mais en jouait, rebondissait merveilleusement. Une sorte d’admiration mutuelle, teintée de respect et de charme. Et dans le film, la fraîcheur proposée par Anaïs fait contrepoint à la violence du hurlement. Carmen est un personnage un peu décalé, mais qui est traversé par une sensibilité, une légèreté, et une forme de pudeur et d’empathie par rapport à la singularité de Cornélius. Et Anaïs a une intelligence et une technique de jeu sidérantes : elle peut tout faire !
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