Programme de la semaine des cinémas de la Vallée de Montmorency :
Enghien (ugc) - Enghien (centre des arts), Franconville - Montmorency - Saint-Gratien - Taverny et les séances du mardi et mercredi de Ermont
Autres cinémas proches : Epinay-sur-Seine - Saint-Ouen l'Aumône
Zoom nouveauté : "Les merveilles" d'Alice Rohrwacher.
L'histoire
Dans un village en Ombrie, c'est la fin de l'été. Gelsomina vit avec ses parents et ses trois jeunes sœurs, dans une ferme délabrée où ils produisent du miel. Volontairement tenues à distance du monde par leur père, qui en prédit la fin proche et prône un rapport privilégié à la nature, les filles grandissent en marge. Pourtant, les règles strictes qui tiennent la famille ensemble vont être mises à mal par l'arrivée de Martin, un jeune délinquant accueilli dans le cadre d'un programme de réinsertion, et par le tournage du "Pays des Merveilles", un jeu télévisé qui envahit la région.
Un film d'Alice Rohrwacher avec Alexandra Lungu, Sam Louwick, Alba Rohrwacher, Sabine Timoteo et avec la participation de Monica Bellucci. Grand prix du festival de Cannes 2014.
Bonus propos d'Alice Rohrwacher, réalisatrice du film
Des références autobiographiques
Le film se passe dans ma région natale, dans la campagne située entre l’Ombrie, le Latium et la Toscane. Ma famille est italo-allemande, il y en a d’ailleurs beaucoup dans cette région. Et les abeilles sont les insectes que je connais le mieux.
Mais à part ces éléments, l’histoire et les personnages ne sont pas autobiographiques, ils me sont seulement familiers. Je ne pourrais pas écrire quelque chose de complètement autobiographique, je m’ennuierais… Lorsqu’on écrit un scénario, il faut trouver des personnages qui peuvent vivre des années et nourrir notre imagination. Il vaut donc mieux qu’ils me soient étrangers, afin que je ne me lasse jamais d’eux. Je préfère avoir le sentiment qu’ils sont constamment réinventés, c’est plus stimulant.
La première impulsion
Lorsqu’on me demande d’où je viens, j’aimerais pouvoir répondre par une ville, comme Rome ou Milan, mais je dois situer ma région entre trois autres (l’Ombrie, le Latium et la Toscane), décrire une campagne où les identités régionales sont toutes détruites. Les gens connaissent parfois cet endroit, mais ils en gardent une impression moyenâgeuse ! C’est ce qui m’a poussée à travailler sur "Les merveilles" : raconter les difficultés rencontrées par la campagne ou ces petites villes qui se sont déguisées en endroits « purs », hors du temps… Avec un peu de recul, on comprend que ces endroits ne sont pas du tout comme ça et que la pureté n’est qu’une prison, dans laquelle ils se sont enfermés pour sauvegarder leur salut économique.
Les abeilles
Je connais très bien les abeilles, je les adore. J’ai même travaillé dans la production de miel pendant un temps. S’il n’a pas été facile de convaincre les assurances qu’il n’arriverait rien de mal pendant le tournage, j’ai vraiment insisté pour qu’on utilise que de vraies abeilles, sans recourir à des effets visuels. Je souhaitais être au plus prêts de la sensation procurée par la matière brute, et que les acteurs travaillent avec de véritables ruches et de vrais essaims. La seule façon d’y arriver était de faire de nombreux essais. Je me souviens que les parents de Maria Alexandra Lungu (qui joue Gelsomina) étaient très contents : ils ont dit que si le film ne se faisait pas, leur fille aurait au moins appris quelque chose et pourrait devenir apicultrice !
Maria Alexandra Lungu dans le rôle de Gelsomina
Je ne savais pas exactement comment je voulais que soit le personnage de Gelsomina, mais je savais que je la reconnaîtrais quand je la verrais. C’est exactement ce qui s’est passé. Après plusieurs mois de recherche, je n’ai eu aucun doute quand j’ai vu Maria Alexandra Lungu en classe de catéchisme (ce qui est assez drôle quand on pense à l’histoire de mon premier film, "Corpo celeste"). Elle avait 11 ans. D’origine roumaine, elle a toujours vécu en Italie. Elle n’avait jamais joué la comédie. Nous avons donc passé beaucoup de temps avec les abeilles pour que, comme son personnage, elle maîtrise totalement les gestes de l’apiculture. Travailler avec elle a été une vraie joie, de par sa présence généreuse et le fait qu’elle a aimé travailler avec nous, ce qui est peut-être le plus important.
La maison
Afin de trouver une image authentique, nous avions besoin d’une maison bien sûr, mais aussi de l’esprit d’une famille qui l’avait habitée. La maison que nous avons choisie a toujours été là. Elle est constituée de parties anciennes et d’autres plus récentes, personne ne l’ayant rénovée de manière uniforme. Jusqu’à récemment, il était tout à fait normal de vivre ainsi : on s’installait dans une maison et, dès lors, on faisait partie d’une histoire pré-existante, qui ne pouvait pas être complètement contrôlée… Seules les nouvelles générations ont voulu donner un seul style à leur habitation, qu’il soit ancien ou moderne. Cela n’a d’ailleurs pas été évident de trouver la bonne maison : toutes celles que nous avons vues étaient soit trop abîmées par les intempéries, soit trop rénovées. Pendant les repérages, nous avions avec nous le très beau livre de Roberto Innocenti, "La Maison", qui, en un sens, nous a guidés.
Monica Bellucci
Pour incarner Milly Catena, la présentatrice de télévision, nous voulions une icône de beauté, une femme qui serait à la fois une bonne fée et une vraie femme. Monica Bellucci a ces deux mondes en elle : le magique et le charnel. Elle est aussi dotée d’un extraordinaire sens de l’humour, y compris à son sujet, ce qui est un trait de caractère fondamental pour une actrice. Le fait de travailler avec elle a aussi recréé le véritable dynamisme du film. Les gens qui ont participé aux scènes du jeu télévisé étaient tout aussi transportés par elle que leurs personnages devaient l’être par Milly Catena. Cela a créé une confusion assez drôle entre la réalité et la fiction, au point que nous ne pouvions plus faire la différence.
À l’origine, le personnage de Monica devait être une icône sans profondeur. Cela ne signifie pas qu’elle devait être superficielle, mais pure et inaccessible. À la fin, dans le dernier plan, on réalise qu’il y a toujours une personne derrière l’icône et qu’elle n’est pas toujours libre.
Un changement profond et douloureux
Aujourd’hui, en Italie, quand on parle de la campagne, ce n’est qu’en termes de destructions, de ruines imminentes, ou comme toile de fond à des histoires romantiques et innocentes. Pourtant, ce qui est en train de s’opérer dans le paysage italien est un changement bien plus profond et douloureux. La longue lutte pour la terre, théâtre d’affrontements millénaires entre les propriétaires terriens et les ouvriers, n’a pas abouti. Elle s’est simplement évaporée. Le champ de bataille a été abandonné et les spéculateurs sont arrivés. Ils ont d’abord brûlé tout ce qu’ils ont trouvé, puis ils se sont emparés des rares zones plus ou moins intactes et les ont transformées en parcs d’attraction, en une sorte de musée à ciel ouvert.
(extrait dossier de presse)
Programme de la semaine des cinémas de la Vallée de Montmorency :
Enghien (ugc) - Enghien (centre des arts), Franconville - Montmorency - Saint-Gratien - Taverny et les séances du mardi et mercredi de Ermont
Autres cinémas proches : Epinay-sur-Seine - Saint-Ouen l'Aumône
Zoom nouveauté : "Les merveilles" d'Alice Rohrwacher.
L'histoire
Dans un village en Ombrie, c'est la fin de l'été. Gelsomina vit avec ses parents et ses trois jeunes sœurs, dans une ferme délabrée où ils produisent du miel. Volontairement tenues à distance du monde par leur père, qui en prédit la fin proche et prône un rapport privilégié à la nature, les filles grandissent en marge. Pourtant, les règles strictes qui tiennent la famille ensemble vont être mises à mal par l'arrivée de Martin, un jeune délinquant accueilli dans le cadre d'un programme de réinsertion, et par le tournage du "Pays des Merveilles", un jeu télévisé qui envahit la région.
Un film d'Alice Rohrwacher avec Alexandra Lungu, Sam Louwick, Alba Rohrwacher, Sabine Timoteo et avec la participation de Monica Bellucci. Grand prix du festival de Cannes 2014.
Bonus propos d'Alice Rohrwacher, réalisatrice du film
Des références autobiographiques
Le film se passe dans ma région natale, dans la campagne située entre l’Ombrie, le Latium et la Toscane. Ma famille est italo-allemande, il y en a d’ailleurs beaucoup dans cette région. Et les abeilles sont les insectes que je connais le mieux.
Mais à part ces éléments, l’histoire et les personnages ne sont pas autobiographiques, ils me sont seulement familiers. Je ne pourrais pas écrire quelque chose de complètement autobiographique, je m’ennuierais… Lorsqu’on écrit un scénario, il faut trouver des personnages qui peuvent vivre des années et nourrir notre imagination. Il vaut donc mieux qu’ils me soient étrangers, afin que je ne me lasse jamais d’eux. Je préfère avoir le sentiment qu’ils sont constamment réinventés, c’est plus stimulant.
La première impulsion
Lorsqu’on me demande d’où je viens, j’aimerais pouvoir répondre par une ville, comme Rome ou Milan, mais je dois situer ma région entre trois autres (l’Ombrie, le Latium et la Toscane), décrire une campagne où les identités régionales sont toutes détruites. Les gens connaissent parfois cet endroit, mais ils en gardent une impression moyenâgeuse ! C’est ce qui m’a poussée à travailler sur "Les merveilles" : raconter les difficultés rencontrées par la campagne ou ces petites villes qui se sont déguisées en endroits « purs », hors du temps… Avec un peu de recul, on comprend que ces endroits ne sont pas du tout comme ça et que la pureté n’est qu’une prison, dans laquelle ils se sont enfermés pour sauvegarder leur salut économique.
Les abeilles
Je connais très bien les abeilles, je les adore. J’ai même travaillé dans la production de miel pendant un temps. S’il n’a pas été facile de convaincre les assurances qu’il n’arriverait rien de mal pendant le tournage, j’ai vraiment insisté pour qu’on utilise que de vraies abeilles, sans recourir à des effets visuels. Je souhaitais être au plus prêts de la sensation procurée par la matière brute, et que les acteurs travaillent avec de véritables ruches et de vrais essaims. La seule façon d’y arriver était de faire de nombreux essais. Je me souviens que les parents de Maria Alexandra Lungu (qui joue Gelsomina) étaient très contents : ils ont dit que si le film ne se faisait pas, leur fille aurait au moins appris quelque chose et pourrait devenir apicultrice !
Maria Alexandra Lungu dans le rôle de Gelsomina
Je ne savais pas exactement comment je voulais que soit le personnage de Gelsomina, mais je savais que je la reconnaîtrais quand je la verrais. C’est exactement ce qui s’est passé. Après plusieurs mois de recherche, je n’ai eu aucun doute quand j’ai vu Maria Alexandra Lungu en classe de catéchisme (ce qui est assez drôle quand on pense à l’histoire de mon premier film, "Corpo celeste"). Elle avait 11 ans. D’origine roumaine, elle a toujours vécu en Italie. Elle n’avait jamais joué la comédie. Nous avons donc passé beaucoup de temps avec les abeilles pour que, comme son personnage, elle maîtrise totalement les gestes de l’apiculture. Travailler avec elle a été une vraie joie, de par sa présence généreuse et le fait qu’elle a aimé travailler avec nous, ce qui est peut-être le plus important.
La maison
Afin de trouver une image authentique, nous avions besoin d’une maison bien sûr, mais aussi de l’esprit d’une famille qui l’avait habitée. La maison que nous avons choisie a toujours été là. Elle est constituée de parties anciennes et d’autres plus récentes, personne ne l’ayant rénovée de manière uniforme. Jusqu’à récemment, il était tout à fait normal de vivre ainsi : on s’installait dans une maison et, dès lors, on faisait partie d’une histoire pré-existante, qui ne pouvait pas être complètement contrôlée… Seules les nouvelles générations ont voulu donner un seul style à leur habitation, qu’il soit ancien ou moderne. Cela n’a d’ailleurs pas été évident de trouver la bonne maison : toutes celles que nous avons vues étaient soit trop abîmées par les intempéries, soit trop rénovées. Pendant les repérages, nous avions avec nous le très beau livre de Roberto Innocenti, "La Maison", qui, en un sens, nous a guidés.
Monica Bellucci
Pour incarner Milly Catena, la présentatrice de télévision, nous voulions une icône de beauté, une femme qui serait à la fois une bonne fée et une vraie femme. Monica Bellucci a ces deux mondes en elle : le magique et le charnel. Elle est aussi dotée d’un extraordinaire sens de l’humour, y compris à son sujet, ce qui est un trait de caractère fondamental pour une actrice. Le fait de travailler avec elle a aussi recréé le véritable dynamisme du film. Les gens qui ont participé aux scènes du jeu télévisé étaient tout aussi transportés par elle que leurs personnages devaient l’être par Milly Catena. Cela a créé une confusion assez drôle entre la réalité et la fiction, au point que nous ne pouvions plus faire la différence.
À l’origine, le personnage de Monica devait être une icône sans profondeur. Cela ne signifie pas qu’elle devait être superficielle, mais pure et inaccessible. À la fin, dans le dernier plan, on réalise qu’il y a toujours une personne derrière l’icône et qu’elle n’est pas toujours libre.
Un changement profond et douloureux
Aujourd’hui, en Italie, quand on parle de la campagne, ce n’est qu’en termes de destructions, de ruines imminentes, ou comme toile de fond à des histoires romantiques et innocentes. Pourtant, ce qui est en train de s’opérer dans le paysage italien est un changement bien plus profond et douloureux. La longue lutte pour la terre, théâtre d’affrontements millénaires entre les propriétaires terriens et les ouvriers, n’a pas abouti. Elle s’est simplement évaporée. Le champ de bataille a été abandonné et les spéculateurs sont arrivés. Ils ont d’abord brûlé tout ce qu’ils ont trouvé, puis ils se sont emparés des rares zones plus ou moins intactes et les ont transformées en parcs d’attraction, en une sorte de musée à ciel ouvert.
(extrait dossier de presse)
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