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Mercredi cinéma : "La douleur" d'Emmanuel Fienkiel avec Mélanie Thierry, Benoît Magimel, Benjamin Biolay.

Publié le : 24-01-2018

Programme de la semaine des cinémas de la Vallée de Montmorency :
Enghien (ugc) - Enghien (centre des arts),  Franconville - Montmorency - Saint-Gratien - Taverny et les séances à Ermont (mardi-mercredi) et Eaubonne (mercredi)
Autres cinémas proches : Epinay-sur-Seine - Saint-Ouen l'Aumône

 

LA DOULEUR de Emmanuel FinkielSortie de la semaine (24 janvier 2018) : "La douleur" d'Emmanuel Fienkiel

L'histoire
Juin 1944, la France est toujours sous l’Occupation allemande. L’écrivain Robert Antelme, figure majeure de la Résistance, est arrêté et déporté. Sa jeune épouse Marguerite, écrivain et résistante, est tiraillée par l’angoisse de ne pas avoir de ses nouvelles et sa liaison secrète avec son camarade Dyonis. Elle rencontre un agent français de la Gestapo, Rabier, et, prête à tout pour retrouver son mari, se met à l’épreuve d’une relation ambiguë avec cet homme trouble, seul à pouvoir l’aider. La fin de la guerre et le retour des camps annoncent à Marguerite le début d’une insoutenable attente, une agonie lente et silencieuse au milieu du chaos de la Libération de Paris.
Un film d'Emmanuel Finkiel avec Mélanie Thierry, Benoît Magimel, Benjamin Biolay, Shulamit Adar, Emmanuel Bourdieu, Grégoire Leprince-Ringuet, Anne-Lise Heimburger, Patrick Lizana

> Bande annonce

 

Bonus : propos d'Emmanuel Finkiel, réalisateur du film.

LA DOULEUR de Emmanuel FinkielD’où est venu le désir d’adapter "La Douleur" de Marguerite Duras ?
L’occasion de travailler sur le texte vient à l’origine d’Elsa Zylberstein et de David Gauquié qui m'ont proposé d'en écrire le scénario. Le désir vient de plus loin. Il se trouve que j’avais lu "La Douleur"  vers 19 ans et comme beaucoup de gens, ce livre m’avait bouleversé. Aussi parce qu’il s’inscrivait dans une histoire personnelle. Cette femme qui attend le retour de son mari des camps de concentration et, alors que tout le monde revient, lui ne revient pas... Ce personnage faisait écho à la figure même de mon père, qui était quelqu’un qui attendait toujours, me semble-t-il. Même après qu’il ait eu la certitude que la vie de ses parents et de son frère s’était terminée à Auschwitz. Pour ces gens qui n’avaient pas de dépouille, l’absence était toujours présente. Et ce n’était pas une idée intellectuelle, c’était très concret. La présence de l’absence... De mon point de vue, c’était ce que racontait "La Douleur" : être face à cette présence. Replié sur soi-même, un voyage intérieur.

Comment avez-vous abordé ce texte très autobiographique, il s’agit de l’histoire personnelle de Marguerite Duras ?
Duras se défend d’avoir travaillé ce texte. Elle affirme qu’elle l’a écrit dans un état et un moment dont elle ne se souvient pas... Sans avoir osé le retoucher quand elle l’a retrouvé, "la littérature m’a fait honte"... De mon point de vue, c’est faux. En relisant et travaillant sur le texte, je me suis rendu compte que tout cela était en fait extrêmement écrit, ciselé, construit. D’autre part, quand on se plonge dans sa biographie et que l’on sait la vraie nature de ses rapports avec Robert Antelme à l’époque, il devient difficile de tout à fait croire à l’authenticité de ce journal quand on lit à quel point elle n’arrivait plus à vivre, à respirer... A un moment donné, j’ai presque été à me dire : « Je la déteste, je ne vais quand même pas faire une adaptation procès !» Et puis j’ai vu que ses ficelles étaient grosses justement  parce qu’elle nous les donnait à voir, justement parce que c’était là que sa douleur devenait plus complexe, et surtout plus épaisse, plus  vraie, raisonnant avec les confusions et les contradictions que chacun de nous peut avoir. J’y ai finalement vu une certaine honnêteté.  Et j’ai fini par l’aimer. C’est ce rapport, cet équilibre entre la fiction savamment créée par Duras et sa réalité biographique qui ont guidé les grandes lignes de l’adaptation.

LA DOULEUR de Emmanuel Finkiel« Vous êtes plus attachée à votre douleur ou à Robert Antelme ? » lui demande à un moment Dionys. Cette phrase qui n’est pas dans le livre résume ce que vous venez de dire...
Dionys lui dit la vérité de ce qu’il constate, avec bienveillance. Je ne peux pas imaginer qu’il n’ait pas pu lui exprimer de telles choses. Dans le texte, Duras le suggère d’ailleurs, lorsqu’elle écrit : « Dispute avec Dionys... il me traite de folle. ».  On ne sait pas pourquoi ils se disputent mais quand on fait une adaptation pour le cinéma, on est bien obligé de mettre des mots là-dessus. J’aurais pu ne pas faire dire à Dionys : « Pourquoi vous vous mettez dans cet état là, vous vous êtes détachée de lui. »” Mais c’est comme ça que j’ai fini par aimer le plus Duras. Je pense que sa douleur n’était pas le sentiment proprement dit mais d’être confrontée à ce qu’elle ne peut pas se dire : « je ne ressens pas ce que je montre ou ce que je dis ». La douleur n’est pas cet état de souffrance dans lequel elle se met en refusant de manger ou en se répandant par terre. La douleur, c’est le fossé, dont elle se rend compte, qui sépare l’état dans lequel elle est et l’état dans lequel elle se met, et qu’elle donne à voir et... à lire.
C’est une position confondante que l’on peut tous connaître, et que j’ai moi-même connue : perdre une personne que l’on adore et se surprendre à ressentir une peine qui n’est pas à la mesure de tout l’amour que l’on avait pour elle, ni à la mesure de ce qu’on montre aux autres. La position de cette femme face à ce mari absent – et plus il est absent, plus il est aimé –, me renvoyait aussi à certains témoignages que j’ai recueillis pour réaliser "Je suis", un documentaire autour des accidents vasculaires cérébraux. Notamment le témoignage honnête et lucide d’une femme dont le mari était tombé dans le coma. Chaque jour, elle parcourait 50 kilomètres pour aller le voir à l’hôpital. On lui disait de lui parler, qu’il l’entendait, elle y croyait. Plus le coma se prolongeait, plus les souvenirs lui revenaient, plus le désir qu’il s’en sorte excitait des choses endormies, plus elle l’aimait. Et un mois et demi plus tard, coup de téléphone à son travail : son mari venait de se réveiller. Elle roule, folle de joie de retrouver son mari, et l’espace d’un instant, elle surprend son regard dans son rétroviseur et se rend compte qu’elle s’est peut-être un peu emballée. Et quand elle a garé sa voiture sur le parking de l’hôpital, elle s’est dit : « Je ne l’aime plus. » Et c’est dans cet état qu’elle a monté les escaliers vers la chambre de son mari et qu’elle l’a serré dans ses bras.

LA DOULEUR de Emmanuel FinkielLe film n’est pas un portrait de Marguerite Duras. Si cela n’était pas évoqué par Rabier, on pourrait presque oublier qu’il s’agit de l’écrivain célèbre.
Oui, je ne voulais pas faire un biopic ! Le cahier des charges au cinéma, par le fait même que tu incarnes, t’oblige à te positionner, à présupposer des choses. Mais je l’ai fait plutôt en amenant Marguerite au niveau de ce qu’est un être humain et qui réagit comme un être humain, pas comme un écrivain. Moi, je ne connais pas d’écrivain, je connais des gens qui écrivent. Le personnage de l’écrivain est un concept et je voulais d’emblée évacuer la figure de Duras - son récit lui-même me l’autorisait puisqu’on ne peut pas dire que c’est une véritable autobiographie.

Comment vous est venue l’idée d’intégrer le deuxième récit du recueil, Monsieur X. dit ici Pierre Rabier ?
L’histoire de Rabier est davantage dans l’action, elle permettait de tendre un fil qui relève presque du suspense. Il paraissait d’autant plus important de poser cette partie avec Rabier qu’elle est un peu le point zéro de l’histoire, le moment où la douleur de Marguerite prend corps. Ce que Marguerite a traversé pendant l’Occupation participe de sa douleur : la manière dont elle a attendu Antelme, cette façon qu’elle a eu de se servir de ce collabo, de se prendre au jeu, avec une légère excitation, et finalement le fréquenter plus que de nature... Cette idée s’est développée d’autant plus naturellement quand je me suis rendu compte que dans le recueil de Duras, "La Douleur" et ce récit sur Rabier étaient les seuls qui étaient numérotés, 1 et 2. Il s’agit donc bien d’un diptyque, que j’ai juste remis dans l’ordre chronologique de l’histoire. On rentre ainsi dans la douleur de Marguerite par l’extérieur, pour mieux l’enfermer ensuite dans son intériorité.

LA DOULEUR de Emmanuel FinkielComment s’est fait le choix de Mélanie Thierry ?
Dans son récit, Duras prend de la liberté avec ce qui est réellement arrivé, son personnage est en partie fictif. Ce qui me permettait moi-même de me libérer de l’impératif de la ressemblance. Il fallait avant tout que la comédienne ait l’épaisseur nécessaire et puisse porter à la fois les traces de la jeunesse de Duras à l’époque et des traces de sa maturité ultérieure. C’est dans cette optique que j’ai commencé à chercher une comédienne.
Je ne pensais pas du tout à Mélanie Thierry au départ. J’ai commencé à faire passer des essais à plusieurs actrices et c’est elle qui m’a dit : « Moi aussi, j’en passerais bien ! »  J’ai accepté presque par politesse. Et aussi avec une pointe de curiosité car ces essais étaient très difficiles. Marguerite évolue énormément et je voulais qu’ils soient significatifs de cette capacité à embrasser cette évolution. Les essais de Mélanie ont été un miracle en soi. La voir s’asseoir et attendre, être à l’affût de chaque bruit, sur le palier, à la fenêtre. Et voir que des milliards de choses se passaient alors qu’elle ne semblait ne rien faire... Quand il s’agit d’incarner une personne publique telle que Duras, il vaut mieux y aller doucement, commencer par un plan large, silhouetté, en contre-jour, pour que, petit à petit, le spectateur s’habitue. Mais j’avais une telle foi en Mélanie que j’ai fait tout le contraire, en ouvrant en plein sur elle, dans elle.
(extrait dossier de presse)

Programme de la semaine des cinémas de la Vallée de Montmorency :
Enghien (ugc) - Enghien (centre des arts),  Franconville - Montmorency - Saint-Gratien - Taverny et les séances à Ermont (mardi-mercredi) et Eaubonne (mercredi)
Autres cinémas proches : Epinay-sur-Seine - Saint-Ouen l'Aumône

 

LA DOULEUR de Emmanuel FinkielSortie de la semaine (24 janvier 2018) : "La douleur" d'Emmanuel Fienkiel

L'histoire
Juin 1944, la France est toujours sous l’Occupation allemande. L’écrivain Robert Antelme, figure majeure de la Résistance, est arrêté et déporté. Sa jeune épouse Marguerite, écrivain et résistante, est tiraillée par l’angoisse de ne pas avoir de ses nouvelles et sa liaison secrète avec son camarade Dyonis. Elle rencontre un agent français de la Gestapo, Rabier, et, prête à tout pour retrouver son mari, se met à l’épreuve d’une relation ambiguë avec cet homme trouble, seul à pouvoir l’aider. La fin de la guerre et le retour des camps annoncent à Marguerite le début d’une insoutenable attente, une agonie lente et silencieuse au milieu du chaos de la Libération de Paris.
Un film d'Emmanuel Finkiel avec Mélanie Thierry, Benoît Magimel, Benjamin Biolay, Shulamit Adar, Emmanuel Bourdieu, Grégoire Leprince-Ringuet, Anne-Lise Heimburger, Patrick Lizana

> Bande annonce

 

Bonus : propos d'Emmanuel Finkiel, réalisateur du film.

LA DOULEUR de Emmanuel FinkielD’où est venu le désir d’adapter "La Douleur" de Marguerite Duras ?
L’occasion de travailler sur le texte vient à l’origine d’Elsa Zylberstein et de David Gauquié qui m'ont proposé d'en écrire le scénario. Le désir vient de plus loin. Il se trouve que j’avais lu "La Douleur"  vers 19 ans et comme beaucoup de gens, ce livre m’avait bouleversé. Aussi parce qu’il s’inscrivait dans une histoire personnelle. Cette femme qui attend le retour de son mari des camps de concentration et, alors que tout le monde revient, lui ne revient pas... Ce personnage faisait écho à la figure même de mon père, qui était quelqu’un qui attendait toujours, me semble-t-il. Même après qu’il ait eu la certitude que la vie de ses parents et de son frère s’était terminée à Auschwitz. Pour ces gens qui n’avaient pas de dépouille, l’absence était toujours présente. Et ce n’était pas une idée intellectuelle, c’était très concret. La présence de l’absence... De mon point de vue, c’était ce que racontait "La Douleur" : être face à cette présence. Replié sur soi-même, un voyage intérieur.

Comment avez-vous abordé ce texte très autobiographique, il s’agit de l’histoire personnelle de Marguerite Duras ?
Duras se défend d’avoir travaillé ce texte. Elle affirme qu’elle l’a écrit dans un état et un moment dont elle ne se souvient pas... Sans avoir osé le retoucher quand elle l’a retrouvé, "la littérature m’a fait honte"... De mon point de vue, c’est faux. En relisant et travaillant sur le texte, je me suis rendu compte que tout cela était en fait extrêmement écrit, ciselé, construit. D’autre part, quand on se plonge dans sa biographie et que l’on sait la vraie nature de ses rapports avec Robert Antelme à l’époque, il devient difficile de tout à fait croire à l’authenticité de ce journal quand on lit à quel point elle n’arrivait plus à vivre, à respirer... A un moment donné, j’ai presque été à me dire : « Je la déteste, je ne vais quand même pas faire une adaptation procès !» Et puis j’ai vu que ses ficelles étaient grosses justement  parce qu’elle nous les donnait à voir, justement parce que c’était là que sa douleur devenait plus complexe, et surtout plus épaisse, plus  vraie, raisonnant avec les confusions et les contradictions que chacun de nous peut avoir. J’y ai finalement vu une certaine honnêteté.  Et j’ai fini par l’aimer. C’est ce rapport, cet équilibre entre la fiction savamment créée par Duras et sa réalité biographique qui ont guidé les grandes lignes de l’adaptation.

LA DOULEUR de Emmanuel Finkiel« Vous êtes plus attachée à votre douleur ou à Robert Antelme ? » lui demande à un moment Dionys. Cette phrase qui n’est pas dans le livre résume ce que vous venez de dire...
Dionys lui dit la vérité de ce qu’il constate, avec bienveillance. Je ne peux pas imaginer qu’il n’ait pas pu lui exprimer de telles choses. Dans le texte, Duras le suggère d’ailleurs, lorsqu’elle écrit : « Dispute avec Dionys... il me traite de folle. ».  On ne sait pas pourquoi ils se disputent mais quand on fait une adaptation pour le cinéma, on est bien obligé de mettre des mots là-dessus. J’aurais pu ne pas faire dire à Dionys : « Pourquoi vous vous mettez dans cet état là, vous vous êtes détachée de lui. »” Mais c’est comme ça que j’ai fini par aimer le plus Duras. Je pense que sa douleur n’était pas le sentiment proprement dit mais d’être confrontée à ce qu’elle ne peut pas se dire : « je ne ressens pas ce que je montre ou ce que je dis ». La douleur n’est pas cet état de souffrance dans lequel elle se met en refusant de manger ou en se répandant par terre. La douleur, c’est le fossé, dont elle se rend compte, qui sépare l’état dans lequel elle est et l’état dans lequel elle se met, et qu’elle donne à voir et... à lire.
C’est une position confondante que l’on peut tous connaître, et que j’ai moi-même connue : perdre une personne que l’on adore et se surprendre à ressentir une peine qui n’est pas à la mesure de tout l’amour que l’on avait pour elle, ni à la mesure de ce qu’on montre aux autres. La position de cette femme face à ce mari absent – et plus il est absent, plus il est aimé –, me renvoyait aussi à certains témoignages que j’ai recueillis pour réaliser "Je suis", un documentaire autour des accidents vasculaires cérébraux. Notamment le témoignage honnête et lucide d’une femme dont le mari était tombé dans le coma. Chaque jour, elle parcourait 50 kilomètres pour aller le voir à l’hôpital. On lui disait de lui parler, qu’il l’entendait, elle y croyait. Plus le coma se prolongeait, plus les souvenirs lui revenaient, plus le désir qu’il s’en sorte excitait des choses endormies, plus elle l’aimait. Et un mois et demi plus tard, coup de téléphone à son travail : son mari venait de se réveiller. Elle roule, folle de joie de retrouver son mari, et l’espace d’un instant, elle surprend son regard dans son rétroviseur et se rend compte qu’elle s’est peut-être un peu emballée. Et quand elle a garé sa voiture sur le parking de l’hôpital, elle s’est dit : « Je ne l’aime plus. » Et c’est dans cet état qu’elle a monté les escaliers vers la chambre de son mari et qu’elle l’a serré dans ses bras.

LA DOULEUR de Emmanuel FinkielLe film n’est pas un portrait de Marguerite Duras. Si cela n’était pas évoqué par Rabier, on pourrait presque oublier qu’il s’agit de l’écrivain célèbre.
Oui, je ne voulais pas faire un biopic ! Le cahier des charges au cinéma, par le fait même que tu incarnes, t’oblige à te positionner, à présupposer des choses. Mais je l’ai fait plutôt en amenant Marguerite au niveau de ce qu’est un être humain et qui réagit comme un être humain, pas comme un écrivain. Moi, je ne connais pas d’écrivain, je connais des gens qui écrivent. Le personnage de l’écrivain est un concept et je voulais d’emblée évacuer la figure de Duras - son récit lui-même me l’autorisait puisqu’on ne peut pas dire que c’est une véritable autobiographie.

Comment vous est venue l’idée d’intégrer le deuxième récit du recueil, Monsieur X. dit ici Pierre Rabier ?
L’histoire de Rabier est davantage dans l’action, elle permettait de tendre un fil qui relève presque du suspense. Il paraissait d’autant plus important de poser cette partie avec Rabier qu’elle est un peu le point zéro de l’histoire, le moment où la douleur de Marguerite prend corps. Ce que Marguerite a traversé pendant l’Occupation participe de sa douleur : la manière dont elle a attendu Antelme, cette façon qu’elle a eu de se servir de ce collabo, de se prendre au jeu, avec une légère excitation, et finalement le fréquenter plus que de nature... Cette idée s’est développée d’autant plus naturellement quand je me suis rendu compte que dans le recueil de Duras, "La Douleur" et ce récit sur Rabier étaient les seuls qui étaient numérotés, 1 et 2. Il s’agit donc bien d’un diptyque, que j’ai juste remis dans l’ordre chronologique de l’histoire. On rentre ainsi dans la douleur de Marguerite par l’extérieur, pour mieux l’enfermer ensuite dans son intériorité.

LA DOULEUR de Emmanuel FinkielComment s’est fait le choix de Mélanie Thierry ?
Dans son récit, Duras prend de la liberté avec ce qui est réellement arrivé, son personnage est en partie fictif. Ce qui me permettait moi-même de me libérer de l’impératif de la ressemblance. Il fallait avant tout que la comédienne ait l’épaisseur nécessaire et puisse porter à la fois les traces de la jeunesse de Duras à l’époque et des traces de sa maturité ultérieure. C’est dans cette optique que j’ai commencé à chercher une comédienne.
Je ne pensais pas du tout à Mélanie Thierry au départ. J’ai commencé à faire passer des essais à plusieurs actrices et c’est elle qui m’a dit : « Moi aussi, j’en passerais bien ! »  J’ai accepté presque par politesse. Et aussi avec une pointe de curiosité car ces essais étaient très difficiles. Marguerite évolue énormément et je voulais qu’ils soient significatifs de cette capacité à embrasser cette évolution. Les essais de Mélanie ont été un miracle en soi. La voir s’asseoir et attendre, être à l’affût de chaque bruit, sur le palier, à la fenêtre. Et voir que des milliards de choses se passaient alors qu’elle ne semblait ne rien faire... Quand il s’agit d’incarner une personne publique telle que Duras, il vaut mieux y aller doucement, commencer par un plan large, silhouetté, en contre-jour, pour que, petit à petit, le spectateur s’habitue. Mais j’avais une telle foi en Mélanie que j’ai fait tout le contraire, en ouvrant en plein sur elle, dans elle.
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